Par Simone Arèse

Ah Noël s’extasiaient les uns, ah Noël s’accablaient les autres…

Mais finalement, heureux ou bougons, dans les chaumières comme dans les châteaux, tous cédaient à la vieille habitude, se réunissant autour de grandes tablées, dans l’attente du Père-Noël, auquel les enfants feignaient de croire encore pour être certains d’avoir des cadeaux.

Or donc, dans un très vieux château qui avait peut-être connu la Belle au bois dormant, la soirée s’annonçait joyeuse, les femmes aux marmites (cette tradition ne s’étant non plus jamais perdue), les enfants courant d’un étage à l’autre pour fouiller tous les recoins à la recherche des cadeaux, et les hommes tisonnant le bon feu qu’avait allumé l’un d’eux dans la grande cheminée. La famille était au complet… enfin presque, car il manquait l’aînée, la mère-grand, depuis longtemps alitée dans l’ancienne maison des gardes, juste en face du château.

Alitée mais pas endormie pour autant car elle avait vu passer dans sa chambre tous les membres de sa famille. Ces visites l’avaient un peu fatiguée, mais néanmoins elle ne trouvait pas le sommeil. Elle écoutait le beau silence de la nuit, parfois troublé d’un cri de chouette, et elle suivait le parcours d’une étoile au carreau de la fenêtre. « L’étoile des rois mages probablement », se dit-elle sans y croire, pour le plaisir de se raconter une histoire.

Donc il était une fois, murmura la vielle dame, il était une fois… La suite de l’histoire ne lui venait pas plus que le sommeil. Elle se résignait à l’insomnie – qui lui était habituelle compagne, quand elle entendit d’étranges bruits, venus de l’extérieur, entre sa maison et le château. Inquiète, elle se leva… Oui : se leva, elle qui ne marchait plus depuis longtemps ! De stupéfaction elle faillit s’asseoir, ce qui eût été bien dommage car elle n’aurait pas vu ce qui se passait dans son parc, où elle descendit, sans souffrir dans l’escalier, sans avoir froid dans sa mince chemise de nuit et sur ses pieds nus. Elle ne vit ni Père-Noël ni Rois Mages, mais une foule d’animaux, accourus depuis la garenne : biches, cerfs, lapins, musaraignes, fouines, écureuils, hérissons et même un couple de loups blancs, qui semblaient danser sous la lune. L’un d’eux s’approcha d’elle, se laissa caresser. Le moment était si magique qu’elle s’adressa à l’animal, comme s’il pouvait comprendre le langage des humains : « Que faites-vous là, ce soir, si nombreux, et semblant tous des amis ? » Et le loup blanc répondit : « Nous venons te remercier d’avoir interdit la chasse dans ton domaine, en ce soir où tant de bêtes sont sacrifiées sur les tables ».

Par Simone Arèse

Publié le mardi 25 décembre, 2018

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